Je ne m’y attendais pas. Le retour du bâton est douloureux. Je n’ai pas fêté mon anniversaire cette année, incapable de me projeter entre covid et désespoir de vieillir. Désespoir de me sentir décliner. 40 ans, ça a toujours été le début de la fin de la vie pour moi. À une époque, c’était même le maximum de ma vie, je ne me voyais pas arriver jusque là.
Je parais beaucoup plus jeune que mon âge, ça sauve les apparences mais ça n’efface pas la réalité. La réalité, c’est l’épuisement récurrent et les kilos en trop. Entre la PMA, puis les différents confinements, j’ai pris 15 kg. Quand je suis arrivée à 76 kg pour 1,80 m, ça m’a fait un électrochoc. J’ai finalement perdu 5 kg ces derniers mois (sport + zéro grignotage + noter tout ce que je mange – ça calme vite !), je me sens un peu plus légère.
On ne me dit quasiment plus : « alors, les enfants, c’est pour quand ? ». Quand cela arrive, je réponds cash que nous ne pouvons pas en avoir. Les gens sont gênés et changent de sujet. Tant mieux.
Par contre, on me demande SI j’ai des enfants. Parce qu’à 40 ans, c’est la norme. Et parce qu’après t’avoir demandé quel est ton travail, c’est la question parfaite pour faire connaissance. Comme si on ne se définissait que par ces deux critères, un emploi et des enfants. Comme si la valeur dépendait de la conformité sociale. Je ne pose plus ces questions, je ne rentre plus dans ce jeu. Mais je reconnais que ça me fait mal – à nouveau – quand on me demande SI j’ai des enfants. Ça me confronte à mon infertilité. Que je pensais avoir acceptée. Mais il faut croire que c’est par vague et que la cicatrice, dans des moments de fragilité, est toujours prête à se rouvrir.
Ce qui est étrange, c’est qu’objectivement à l’heure actuelle, je pourrais tout à faire choisir de ne pas avoir d’enfant(s). Parce que l’avenir qu’on leur réserve sera tout simplement horrible et qu’il devient vraiment compliqué de ne pas le voir. On fonce droit dans le mur mais peu s’en offusquent. C’est tellement plus simple de bétonner les villes, de cultiver de manière intensive à grand renfort de pesticides, de parquer des animaux dans des enclos toujours plus petits… De construire des voitures toujours plus grosses et donc polluantes, de taxer le train au lieu de l’avion. De produire toujours plus pour qu’on consomme plus. De nous abreuver de publicités qui finissent par nous faire acheter de l’inutile, du futile et nous en rendre fiers. De créer du jetable au lieu du durable parce que c’est plus rentable (à court terme). De piller les pays pauvres encore et toujours (les métaux rares par exemple). De croire qu’on ne sera pas touchés… alors que les ressources viendront à manquer… Bref, pardon pour ce couplet alarmiste mais souvent, ça me déprime. Et irrationnellement, malgré tout cela, je suis tout de même triste de ne pas avoir eu d’enfant(s). Parce que je n’en ai pas eu le choix, que cela s’est imposé à moi et que cela reste injuste.
Des fois, je me dis que c’est difficile de faire le deuil de quelque chose qui n’a pas eu lieu…